L'Histoire de Bages


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Quelques mots sur l'Histoire de Bages

Si le nom de Bages n'apparaît pour la première fois que dans un document de la fin du 8ème siècle, le territoire de la commune a été parcouru par l'homme dès les temps préhistoriques comme le prouvent deux objets trouvés au Pavillon (une hache en silex) et à Java (une pointe de lance de l'âge du bronze). Mais les vestiges anciens les plus nombreux et les plus importants datent de l'époque gallo-romaine, et on a ainsi pu localiser plusieurs sites de villas à proximité du village actuel : au Clozel, à la Croix-Petite, au col d'Estarac, au Monédières, au Castellas... Et le nom même de Prat–de-Cest est incontestablement d'origine latine : « Pratum Sextum », comme le mentionne un acte du 11ème siècle, signifie « les prés du Sixième » ( c'est-à-dire six mille romains après Narbonne sur la Via Domitia).

De l'époque médiévale, il ne reste à Bages que l'église du 11ème siècle (?), très remaniée depuis, et qu'un pan de muraille de l'ancien château du 13ème siècle, ainsi que quelques bâtiments du 11ème siècle au domaine de Prat-de-Cest, et la Croix de la Lieue (13ème siècle, restaurée en 1986) en bordure de la Nationale 9, au pied du lotissement de Rochegrise. Bages n'est alors qu'un petit village d'agriculteurs et de pêcheurs qui ne compte que 58 feux (soit un peu plus de 200 habitants) au 14ème siècle. Il appartient alors au chapitre des chanoines de l'église Saint-Paul de Narbonne qui restera « seigneur de Bages » jusqu'à la Révolution française.

Aux 16ème et 17ème siècles, Bages n'est pas épargné par les conflits politico-religieux qui déchirent le pays : ainsi le village est un lieu stratégique très disputé pendant les guerres de la Ligue entre 1585 à 1596, puis lors de la révolte du duc de Montmorency en 1632. Du règne de Louis XIII à la fin de l'ancien régime, malgré les guerres et un certain nombre de calamités naturelles, Bages connait un certain développement. Comptant plus de 800 personnes en 1784, il est administré par trois consuls, élus chaque année par le « conseil général » de la communauté. Son économie repose alors essentiellement sur l'agriculture (les céréales, plus que la vigne), les oliveraies, l'élevage (principalement ovin et caprin), la pêche et l'artisanat.

Sous la Révolution et l'Empire, Bages (auquel on rattache le domaine de Prat-de-Cest et ses dépendances) s'adapte tant bien que mal aux nouvelles institutions du pays, payant comme beaucoup de villages un lourd tribut aux guerres napoléoniennes (l'expédition d'Égypte, en 1798-99, fait périr à elle seule dix-huit Bageois). Les pêcheurs bénéficient de la mise en place d'une prud'homie en 1801, et un important marais salant est créé à l'Estarac en 1811 (il fonctionnera jusqu'au début des années 1950).

Tombé à moins de 700 habitants au début du 19ème siècle, Bages reste un petit village de pêcheurs, d'agriculteurs et d'artisans, ne s'ouvrant lentement au monde moderne que sous la Monarchie de Juillet (1830-1848). Grâce à la viticulture, il commence à prendre son essor sous le Second Empire et au début de la Troisième République, atteignant presque 1 200 habitants au début des années 1880. Il est alors en pleine prospérité comme en témoignent l'extension du village hors de la vieille enceinte médiévale, avec la construction de nombreux bâtiments dont l'école communale (aujourd'hui Centre Louis Daudé) en 1884. Comme toutes les communes du Narbonnais, il est touché par la crise du phylloxéra, puis par la crise viticole de 1907. Les Bageois participent en nombre au grand mouvement de protestation lancé par Marcellin Albert : l'un d'entre eux, un ouvrier agricole de 18 ans, Gaston Pagès, est tué par la troupe lors d'une manifestation à Narbonne le 20 juin 1907.

Après la Grande Guerre, au cours de laquelle périssent au champ d'honneur 31 Bageois, la commune connaît un déclin régulier jusqu'à la fin des années 1960, tombant autour de 550 habitants. Le vieux village et le hameau des Pesquis ont alors de nombreuses maisons en ruine ; seul, Prat-de-Cest, sur la Nationale 9, connaît un certain développement, aspirant même à devenir une commune indépendante. Ce n'est que dans les années 1970, grâce notamment à la démoustication et à la mise en place d'un réseau de tout-à-l'égout, que commence le renouveau de la commune qui compte aujourd'hui plus de 800 habitants. Si la viticulture et la pêche demeurent toujours présentes, elles ne jouent plus dans l'économie locale qu'un rôle secondaire, Bages accueille de plus en plus une population attirée par la beauté du site.

Jean Guiffan

Auteur de l'Histoire de Bages

(Éditions Élysiques, 2007)